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Détox 08/08/2022

Enseigner le surf, un vrai métier

Un job, un hobby, un passe-temps, un métier, une passion ?

 

Entre ceux qui déclarent que moniteur de surf c'est cool, les mairies qui tapent dans le portefeuille des écoles de surf en échange du droit de travailler sur la plage, et les élèves qui vous demandent pourquoi vous ne surfez pas pendant le cours de surf, je pense que le temps est venu d'expliquer le métier d'entraîneur de surf et la gestion de l'activité.

 

Tout d'abord, il est une règle tacite dans le métier qui veut que 99% des gérants d'écoles de surf soient également moniteurs de surf et donc experts dans leur domaine avant de n'être des businessmen. L'esprit du surf, pour moi, ce sont des passionnés d'abord, des entrepreneurs dans un second temps, et pas l'inverse. Ce qui explique que, pour l'instant, le vendeur de pizzas ne propose pas des cours de surf mais reste dans son domaine de compétence, la restauration.

 

 

Papa, plus tard, je serai prof de surf !

 

 

Il est vrai qu'il y a des côtés fun, contrebalancés par d'autres moins agréables, comme dans tout métier :

 

A l'instar des autres activités saisonnières, les moniteurs de surf peuvent profiter de la période hivernale pour s'adonner à d'autres activités, professionnelles ou de loisir.

 

Par contre, le pic de la saison dure 3 semaines pendant lesquelles ils doivent travailler comme cinq. La marée ne leur permet d'enseigner qu'un partie de la journée et leurs effectifs limités à 8 élèves, contrainte nécessaire, de même que les jours annulés pour cause d'intempéries rendent difficile leur capacité à gagner de l'argent.

 

Autre point positif : travailler en plein air plutôt que derrière un bureau. Toutefois, rester 5 à 7 heures d'affilée en plein soleil par 30 à 40°, pour un autre jour être frigorifié par le vent du nord, marcher dans le sable avec le courant qui vous tire constamment sur le côté, maintenir un niveau de vigilance constant pour surveiller ses élèves, de même que les autres surfeurs, susceptibles de représenter un danger, être à l'écoute des changements liées à l'extrême variabilité de l'environnement marin, tout cela demande une attention de tous les instants et engendre de la fatigue.

 

Certains vieux surfeurs ont la peau abîmée comme s'ils avaient passé leur vie à naviguer au long cours, d'autres ont les genoux qui se font la malle, d'autres des problèmes de dos, ou encore des lésions oculaires liés à l'exposition des yeux au soleil rasant. J'ai même connu un moniteur de surf qui avait la cornée irritée parce qu'un bébé huître s'y était installé.

 

Le métier permet d'être au plus près des vagues, oui et non.

 

Enseigner le surf et surfer sont deux actions totalement différentes. Un exemple : les débutants glissent dans les mousses du bord, un prof de surf sérieux ne les abandonne pas pour aller prendre des vagues au large, à moins que ce ne soit pour un rapide aller retour afin d'aider un élève plus expérimenté. Ou parce qu'on lui a demandé une démonstration. On comprend alors qu'enseigner le surf expose à la frustration de ne pouvoir surfer les belles vagues qui déroulent au loin.

 

Toutefois, lorsque les élèves sont capables d'aller prendre les vagues du fond, le moniteur les accompagne et peut attraper une ou deux vagues pour retourner au bord, ce qui est déjà mieux que rien.

 

 

La journée classique d'un prof de surf à son compte
 

 

Je vais décrire une journée au plus fort de la saison, au mois d'août.

 

7h-8h30 : chargement du matériel (planches, combinaisons, lycras) à l'intérieur du minibus.

 

15 minutes : aller maison-plage (en prévoyant large).

 

08h45-16h : journée à la plage pour mise en place de trois cours de surf qui consistent à charger et décharger le camion et équiper chaque nouveau groupe, appeler les retardataires, passer plusieurs fois la dune, donner le cours de surf (échauffement, démonstrations et explications sur le sable et dans l'eau, retours au bord), sauver un baigneur en détresse en le ramenant au bord, communiquer le planning du lendemain, charger le camion une dernière fois et rentrer à la maison. Une pause repas de 20 minutes au milieu.

 

15 minutes : retour plage-maison.

 

16h15-17h30 : rinçage du matériel et préparation pour le lendemain.

 

17h30-18h30 : prise de réservation, modifications de planning, communication auprès des élèves des horaires des jours suivants.

 

18h30-19h30 : annulation de dernière minute qui chamboule le planning, rappel des élèves pour communiquer les nouveaux horaires, contact des clients potentiels qui voulaient surfer car une place s'est libérée du fait de l'annulation mais c'est probablement trop tard.

 

21h-22h : comptabilité, communication sur les réseaux.

 

Total : 14 heures de travail presque non stop, en retirant la pause repas du midi.


 

Un métier de passionnés


 

A l'évidence, en creusant la question, on réalise qu'enseigner le surf ne consiste pas à se dorer la pilule les pieds dans le sable en sirotant une pina colada. En tout cas, pas en France où l'activité est très encadrée par les services de l’État.

 

L'océan change d'heure en heure, de jour en jour, de même que les élèves auront des niveaux et des profils différents. Le challenge va donc consister pour l'enseignant à exploiter le potentiel pédagogique des conditions océaniques pour permettre à ses élèves de progresser, quelles que soient leurs différences et leurs aptitudes. Ainsi, pour peu que l'on soit passionné, aucune séance de surf ne sera identique à la précédente, grâce à l'extrême variété de ces paramètres humains et environnementaux.

 

Sauf bien sûr à se contenter de faire de la poussette, en envoyant les élèves comme des pizzas, les uns à la suite des autres, sans trop réfléchir. Voir l'article consacré à ce sujet, qui pèse les avantages et inconvénients de cette pédagogie de la poussette.

 

C'était un petit panorama du métier d'instructeur de surf, tant il est vrai que les clichés ont la vie dure dès que l'on parle de surf.

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